Évacuation du camp de réfugiés de Lavrio

Ce mercredi 5 juillet à 4h du matin, les forces de police grecques ont pénétré dans le camp de réfugiés de Lavrio, situé à 60 kilomètres au sud d’Athènes. Plus de 50 migrants ont été évacués de force et déplacés dans le camp d’Œnophyta, à quelque 15 kilomètres au nord de la capitale. Contrairement à ce qui a été annoncé par l’État grec, les habitants du camp n’ont pas quitté volontairement le lieu, mais ont été contraints par la force d’évacuer les bâtiments. Femmes, hommes et enfants ont ainsi été réunis dans la cour centrale pendant que les forces de l’ordre détruisaient les portes et les fenêtres des logements afin de les rendre inhabitables.

Le camp détenait le statut de « Centre de séjour temporaire pour les demandeurs d’asile étrangers » depuis 1947. Il était alors géré par la branche grecque de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge, le Croissant-Rouge, les Nations-Unies et dans une moindre mesure les organisations politiques turques en exil à partir des années 1970. Mais en 2017, le gouvernement de Syriza retire le soutien de l’État au camp. Depuis, le bon fonctionnement du camp ne tient plus qu’à la solidarité locale et internationale permettant de pallier les besoins matériels et alimentaires.

Les Amitiés kurdes de Bretagne se sont rendues à plusieurs reprises dans le camp pour organiser des ateliers artistiques en direction des enfants et des adultes et participer à des chantiers solidaires. C’est donc avec consternation et colère que nous avons été informés hier matin des expulsions organisées dans la nuit par les forces de l’ordre grecque.

Nous dénonçons les conditions dans lesquelles ces expulsions ont eu lieu et demandons qu’un nouvel espace aux normes sanitaires et sécuritaires soit proposé aux habitants et aux personnes qui organisaient le camp de Lavrio, afin que la tradition d’accueil qui s’y était développée depuis 40 ans puisse se perpétuer.

Nous exprimons notre indignation vis-à-vis du gouvernement grec qui place encore une fois les Kurdes dans une position inique. L’État turc faisait peser sur le camp de sérieuses menaces depuis de nombreuses années, le qualifiant de camp d’entraînement terroriste abritant des membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et d’autres groupes de gauche interdits en Turquie. À cinq jours d’une rencontre entre le Premier ministre grec Kyriákos Mitsotákis et le président turc Recep Tayyip Erdoğan, en marge du sommet de l’OTAN à Vilnius, c’est donc le camp de Lavrio et les migrants qui y étaient hébergés qui subissent les conséquences des réorientations diplomatiques des gouvernements turcs et grecs, aux positions nationalistes et antimigrantes de plus en plus véhémentes.

Le camp de Lavrio faisait figure d’exception au milieu de cette crise politique et humanitaire que traverse la Grèce depuis plus de 10 ans. Lavrio était un symbole d’espoir pour les migrants kurdes, syriens, turcs, afghans… qui y trouvaient un lieu de sécurité et de protection ; les habitants de la ville de Lavrio pour qui le camp symbolisait l’entraide et la cohabitation ; les militants et les réfugiés politiques turcs et kurdes qui y voyaient un espace de résistance et tous les soutiens locaux et internationaux qui, par leurs actions, ont illustré la force de la solidarité internationale.

Solidarité avec nos camarades kurdes emprisonnées en Turquie et en Europe ; solidarité avec tous les réfugiés contraints de fuir les États répressifs et totalitaires ; solidarité avec les habitants du camp de Lavrio.  

Berxwedan