Quel chemin parcouru par les Kurdes depuis 1979, date à laquelle ils se présentaient pour la première fois, remportant alors deux municipalités ? Quarante-cinq ans plus tard, le DEM-Parti vient d’enregistrer une victoire retentissante compte tenu de l’ampleur de la répression et des fraudes massives. Le peuple kurde s’est mobilisé avec dignité, courage et enthousiasme pour porter à la tête des municipalités une nouvelle génération d’élus déjà menacés d’emprisonnement. Près de 3 000 d’entre eux croupissent dans les geôles turques ! La tâche sera rude. Les administrateurs nommés par RT Erdoğan, après la confiscation des mairies, laissent des finances exsangues alors que les subventions d’État ont été supprimées.
Aucune politique alternative possible sans les Kurdes
Déjà en 2015, Selahattin Demirtaş avait fait mordre la poussière à Erdoğan. Le camouflet est aujourd’hui retentissant pour l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More. De manière spectaculaire, les électeurs ont exprimé leur détresse face à la crise économique et l’autoritarisme violent du pouvoir. Les islamo-conservateurs ont été balayés dans toutes les grandes villes, permettant au CHPParti républicain du Peuple (Cumhuriyet Halk Partisi), parti kémaliste et nationaliste de centre-gauche. More de s’imposer comme la première force politique. Dans cette victoire, les Kurdes ont joué un rôle déterminant. Aucune alternative ne sera possible sans eux et sans prendre en compte leurs revendications démocratiques.
Affaibli, Erdoğan joue son va-tout : la répression bat son plein
Même si Erdoğan sort affaibli de cette séquence, l’heure de la contre-offensive, teintée d’esprit de vengeance, a sonné. Selon une pratique éculée, le pouvoir a cru possible d’annuler le scrutin de la province de Van remporté largement par le DEM-Parti. Cependant la mobilisation populaire au Kurdistan, l’indignation en Turquie et la réprobation internationale ont fait reculer Erdoğan. A n’en pas douter, de telles manœuvres se reproduiront mais l’actuel rapport de force peut mettre Ankara sur la défensive. A nouveau, la répression bat son plein contre les journalistes et les travailleurs réunis à l’occasion du 1er mai. Le premier ministre turc a proféré une menace d’interdiction contre le DEM-Parti après quelques mois d’existence.
La mobilisation internationale sera déterminante, l’unité des Kurdes aussi
La volonté d’éradiquer le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More et toute affirmation de la kurdicité, présentée comme une priorité, est une autre stratégie pour mobiliser l’opinion nationaliste et masquer la situation catastrophique du pays. La guerre, qui ne dit pas son nom, a commencé depuis des mois par des bombardements et des assassinats ciblés en Irak et en Syrie. Erdoğan vient de se rendre à Bagdad pour signer un accord en échange d’un consentement de l’État irakien et des milices pro-iraniennes dans le cadre d’une opération d’envergure cet été. Le gel par Ankara du traité des forces conventionnelles en Europe vise à se soustraire à la surveillance de pays tiers face à la concentration des armements dans les zones d’affrontement avec le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More. Alors que le Moyen-Orient est dans le chaos, que l’État islamique reprend de la vigueur, l’agression turque constitue un nouveau danger. Rien n’est inéluctable et de nombreuses forces peuvent s’y opposer. La mobilisation internationale sera déterminante. L’unité des Kurdes, en dépit des divergences idéologiques, est dans ce contexte, indispensable. La division annihilerait des décennies de lutte jusqu’à remettre en cause l’existence même d’un Kurdistan autonome en Irak.
Dénonçons les décisions des autorités françaises de criminaliser les Kurdes
Comment ne pas s’insurger contre les décisions récentes des autorités françaises de criminaliser les Kurdes de France et ceux de Belgique considérés comme des héros au Moyen-Orient et des terroristes ici ? Les perquisitions des médias, les arrestations, les condamnations, le gel des avoirs, le retrait du statut de réfugiés et les extraditions sont inacceptables et désastreuses pour l’image de notre pays. Cela doit cesser immédiatement. Les Kurdes ne sont pas des monnaies d’échange, ils doivent être protégés et soutenus sans équivoque. Les organisations de la CNSKCoordination nationale Solidarité Kurdistan :
• Alternative Libertaire
• Amis du Peuple kurde en Alsace
• Amitiés Corse Kurdistan
• Amitiés kurdes de Bretagne (AKB)
• Amitiés kurdes de Lyon & Rhône Alpes
• Association iséroise des Amis des Kurdes (AIAK)
• Association Solidarité France Kurdistan
• Centre d’Information du Kurdistan (CIK)
• Collectif Azadi Kurdistan Vendée
• Conseil démocratique kurde de France (CDKF)
• Ensemble
• Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP)
• Mouvement de la Jeunesse communiste de France (MJCF)
• Mouvement de la Paix
• Mouvement des Femmes kurdes en France (TJK-F)
• Nouveau Parti anticapitaliste (NPA)
• Parti communiste français (PCF)
• Réseau Sortir du Colonialisme
• Solidarité et Liberté Provence
• Union démocratique bretonne - Unvaniezh Demokratel Breizh (UDB)
• Union syndicale Solidaire
More n’auront de cesse d’être au côté des nouvelles municipalités, de tous les Kurdes pour leur unité face à une Turquie qui refuse toute solution politique et pacifique. Elles appellent toutes les forces de notre pays à agir dans ce sens.
Pascal Torre et Annick Samouelian, co-présidents de la Coordination nationale Solidarité Kurdistan
(paru dans ‘’La LETTRE d’Information – Pour faire grandir la voix et les droits du peuple kurde’’)
Les intertitres sont des AKB