Leyla Zana a été condamnée le 24 mai dernier à 10 ans de prison par un tribunal de Diyarbakir pour «appartenance à une organisation terroriste» et «propagande».
En 1994, elle avait déjà été condamnée pour des propos comparables à quinze ans de prison. Prix Sakharov en 1995, Leyla Zana avait été à nouveau l’objet en avril 2008 d’une condamnation à 10 ans de prison que la Cour de Cassation avait annulée.
Cet acharnement contre cette figure emblématique de la lutte pour les droits des Kurdes en Turquie suscite des réactions indignées.
Alain Coquart, conseiller municipal (PCF) de Rennes : «totalement inacceptable»
Alain Coquard, conseiller municipal, a tenu, lors de la séance du conseil municipal de Rennes du 4 juin dernier, à exprimer, au nom du groupe communiste, son émotion et à encourager ses collègues à réagir :
au regard des liens d’amitié tissés ici même avec le peuple kurde et notamment la ville de Diyarbakir, je souhaite attirer l’attention du conseil municipal sur la situation de la députée kurde Leyla Zana. Il lui est reproché d’avoir exprimé à plusieurs reprises son soutien au PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More (Parti des travailleurs du Kurdistan) et à son leader emprisonné Abdullah Ocalan. On lui reproche également d’avoir demandé, dans un entretien accordé à un média internet kurde en décembre dernier, l’organisation d’un référendum en Turquie sur l’avenir du peuple kurde. Sa situation, tout comme celle du peuple kurde est totalement inacceptable et nous sommes très inquiets de ces cruelles et nouvelles mesures répressives, attentatoires au droit et à la démocratie. Nous savons, Monsieur le Maire, l’implication qui est la vôtre et nous nous associerons à toutes initiatives favorisant le respect des droits du peuple kurde.
Hélène Flautre (EELV) : « nouveau coup dur pour la liberté d’expression »
Réagissant à la nouvelle condamnation de Leyla Zana, Hélène Flautre, députée européenne (Europe Écologie – Les Verts) :
en tant que co-présidente de la commission mixte parlementaire UE-Turquie, membre des amis de la Turquie, je tiens à exprimer ma profonde inquiétude. La condamnation d’hier est comparable à celle qu’elle avait subie dix huit ans plus tôt. Elle prouve donc que la liberté d’opinion est encore aujourd’hui menacée en Turquie par les tribunaux et le code pénal. C’est pourquoi je demande au gouvernement turc ainsi qu’au parlement turc de prendre les mesures législatives nécessaires afin d’assurer une réelle liberté d’opinion en garantissant les libertés fondamentales, en réformant la loi anti-terreur et par conséquent, de libérer Leyla Zana de toute charge.
Gabi Zimmer (GUE/NGL): « profondément choquée »
Mme Zana a été la porte-parole de la lutte des prisonniers kurdes dans les années 1990. Elle a été élue au Parlement turc en 1991, devenant ainsi la première femme kurde députée en Turquie. Mme Zana a déjà passé une décennie en prison entre 1994 et 2004 pour ses supposées relations avec le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More. Elle a été nommée deux fois pour le prix Nobel de la paix et a reçu le prix Andrei Sakharov pour les droits de l’Homme en 1995 au Parlement européen.
Profondément choquée par cette nouvelle condamnation qui frappe Leyla Zana, « une ambassadrice franche, courageuse et loyale du peuple kurde, et tout particulièrement des femmes kurdes», Gabi Zimmer, Présidente du groupe de la Gauche unitaire/Verte nordique (GUE/GVN) au Parlement européen demande au président du Parlement de mettre cette question au sommet des priorités des débats :
l’ensemble du Parlement européen doit s’unir pour condamner cet acte inacceptable du gouvernement turc et pour s’assurer que cette sentence soit révoquée dès que possible.
Joël Dutto écrit à Laurent Fabius, ministre français des Affaires Étrangères
Joël Dutto, conseiller général honoraire, conseiller municipal et communautaire PCF de Marseille, s’est adressé à Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, pour demander à la France de réagir contre la condamnation de Leyla Zana et la répression « inadmissible » menée par le gouvernement turc. Dénonçant l’accord sécuritaire signé en 2011 entre la France et la Turquie, sous le prétexte de lutter contre le « terrorisme », Joël Dutto affirme que
aujourd’hui, avec la gauche aux affaires du pays, rien ne peut justifier ce soutien inconditionnel à la Turquie : sous le prétexte de lien présumé avec le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, la justice turque produit les situations de répression à l’identique de celle qu’à connu ce pays dans le période la plus noire du coup d’État militaire. Des centaines d’élu(e)s sont aujourd’hui emprisonnés, comme le sont également des syndicalistes, journalistes, des enfants, des militants des Droits de l’Homme, ainsi que de nombreux avocats. En exprimant une position de fermeté vis-à-vis de la Turquie, la France serait fidèle à sa politique de promotion et de protection des Droits de l’Homme et des processus de démocratisation composante majeure de la politique étrangère de la France et de l’Union européenne et au rôle actif qu’elle prétend jouer au sein du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU.
La répression du gouvernement AKP contre les femmes kurdes s’est intensifiée
La répression sans précédent du gouvernement AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More contre les femmes kurdes s’est intensifiée. Selon Gultan Kisanak, co-présidente du BDP, principal parti kurde, quelques 500 femmes de son parti sont en prison, dont deux députées sur six et deux maires sur 32 ainsi que 25 membres du Conseil national des Femmes du BDP, faisant de la Turquie la plus grande prison du monde pour les élus.
André Métayer