Le juge Essa Moosa, né en 1936, était président du KHRAG (Kurdish Human Rights Action Group), une organisation créée le 14 février 1997 au Cap (Afrique du Sud), qui s’efforce de protéger les droits de tous les Kurdes et qui milite pour résoudre pacifiquement la question kurde au Moyen-Orient, plus particulièrement en Turquie. Il est décédé le 26 février 2017.
Essa Moosa, l’avocat du légendaire dirigeant Nelson Mandela qui a ouvert la voie à un système démocratique en Afrique du Sud après les négociations qu’il a menées avec l’État dans les années 1990, est décédé. Essa Moosa a participé à de nombreux événements kurdes en Turquie, au Kurdistan et en Europe et a manifesté sa solidarité avec le mouvement kurde. Essa Moosa a également été membre de l’initiative internationale pour la libération d’Öcalan. Il a participé à la délégation internationale pour la Paix avec 11 personnalités de renom qui sont allés en Turquie l’année dernière pour rencontrer Öcalan. (ANF)
Témoignage de Solenne Horellou
Solenne Horellou est une véritable globe-trotteuse, qui enseigne le français dans différents pays depuis une dizaine d’années. Elle est rentrée hier en Namibie d’un voyage de 8 400 km à travers 5 pays d’Afrique australe, qui l’a conduit jusqu’au Cap. Elle a vécu deux ans plus tôt à Suleymania et a arpenté les 4 parties du Kurdistan. Par sa capacité à capter le pouls des pays qu’elle visite, sa connaissance et sa compréhension de la situation des Kurdes est remarquable. Solenne Horellou attire notre attention sur le rôle qu’aurait joué Essa Moosa dans une négociation pour le règlement de la question kurde, si Erdoğan avait vraiment voulu négocier :
ancien avocat de Nelson Mandela à l’époque où ce dernier était en prison, le juge Essa Moosa était également le défenseur des droits des détenus politiques emprisonnés durant la période d’apartheid. Il était dans la région du Cap la première personne que les activistes anti-apartheid appelaient lorsqu’ils étaient arrêtés par les autorités dans les années 70 et 80. Une personne déjà très impliquée dans la lutte pour la justice sociale et le respect des droits de l’homme. Dès la fin de l’apartheid en 1991, c’est une autre cause que le juge avait embrassée : celle des Kurdes ! Pourquoi ? Tout simplement parce que la situation des Kurdes au Moyen-Orient lui semblait similaire à celle contre laquelle il avait lutté pendant des années en Afrique du Sud. Et c’est ainsi que Mandela lui-même, à la fin des années 90, a garanti à Öcalan, le leader du PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, de lui offrir l’exil politique s’il venait en Afrique de Sud. Les Sud-africains étaient prêts à accueillir Öcalan. Ils l’attendaient. Mais, comme chacun le sait, Öcalan n’est jamais arrivé, stoppé en route, le 15 février 1999, à Nairobi, au Kenya et lâchement livré aux autorités turques.
Une opportunité incroyable qu’Erdoğan n’a pas su saisir
Le juge, devenu l’un des avocats internationaux d’Öcalan, se rendait chaque année en Turquie, dans l’espoir d’engager des discussions avec les autorités turques et de rendre visite à son client, détenu depuis maintenant 18 ans sur l’ile d’Imrali, au sud de la mer de Marmara. Mais, même en sa qualité d’avocat, il n’a jamais rencontré Öcalan, qui est depuis quelques années privé de toute visite de la part de sa famille et de ses avocats, vivant en total isolement… La Turquie a certainement manqué une opportunité incroyable : celle d’entrer en communication avec un médiateur de paix si unique et si expérimenté et de progresser dans la voie de la résolution de la question kurde.
Message de condoléances de Gültan Kışanak
A l’occasion du 24e congrès de l’Internationale socialiste (IS) qui se tenait au Cap, une délégation du BDP composée de Gültan Kışanak, co-présidente, Nazmi Gür, vice co-président et Eyyup Doru, représentant le BDP en Europe, avait, le 30 août 2012, rencontré le KHRAG et son président Essa Moosa, avant d’avoir une entrevue officielle avec Desmond Tutu, lauréat du prix Nobel de la Paix.
Gültan Kışanak, elle qui fut députée, co-présidente du BDP et aujourd’hui maire destituée de Diyarbakir, a, du fond de sa prison, adressé un message de condoléances à la famille d’Essa Moosa, à ses amis, et tous les africains qui luttent pour la paix et la liberté :
Essa Moosa, l’avocat du leader de l’Afrique du Sud, Nelson Mandela, a été de toutes les luttes contre le racisme et défenseur de tous les peuples qui cherchaient la liberté. C’est pourquoi les Kurdes ont rencontré la route d’Essa Moosa. J’ai eu le privilège de l’entendre et reste impressionnée par sa passion concernant la protection de la paix et des libertés. J’ai retenu sa phrase culte : nous n’avons jamais abandonné l’espoir. Il y a aujourd’hui des millions de défenseurs de la paix et de la liberté sur la terre. La paix est la plus importante des valeurs que nous nous devons de protéger. Essa Moosa était un avocat universel, un défenseur de la paix et des libertés. Qu’il repose en paix.
André Métayer