Le rôle des agences de presse est de fournir aux journaux les informations dans l’instant, au plus près de l’événement, puisées autant que faire se peut auprès de différentes sources. Ainsi l’Agence France Presse fournit-elle, heure par heure, des informations sur le front des combats qui opposent l’armée turque aux rebelles du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More) ; mais, pour l’essentiel, elle puise ses informations auprès des services turcs, ce qui explique sans doute qu’elle conclut souvent ses communiqués par “ce mouvement (le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More) est considéré comme une organisation terroriste par la Turquie et par une grande partie de la communauté internationale”.
Ce qui explique aussi, sans doute, ses dérapages verbaux comme le dernier en date : alors que la dépêche du 14 juin titrait : UN SOLDAT TURC TUÉ PAR DES REBELLES KURDES, celle du 12 juin titrait : UN REBELLE KURDE DU PKK ABATTU PAR L’ARMÉE.
Abattu ? On n’emploie même plus ce terme quand il s’agit de tuer des animaux – ils sont “euthanasiés” – sauf s’il s’agit de bêtes sauvages malfaisantes.
Abattu ? Même les militaires hésitent à employer ce mot (un ennemi, on “l’élimine”, on le “neutralise” et les régions conquises sont “nettoyées”).
Abattu ? L’AFP voudrait-elle nous faire savoir que l’armée turque ne respecte pas les lois de la guerre ?
L’AFP rend bien compte de l’avantage pris par l’option militaire sur les appels à la négociation dans le bras de fer entre gouvernement turc et opposition kurde, depuis l’annonce le mois dernier par Abdullah Öcalan, le leader emprisonné du PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, qu’il abandonnait ses efforts en faveur de la paix, mais omet d’en rappeler les raisons pourtant clairement explicitées : “en l’absence de vrais interlocuteurs, a déclaré A. Öcalan, mes efforts n’ont plus de sens.”
De même l’AFP oublie de signaler l’affrontement qui a opposé le député de Diyarbakir et Président du groupe parlementaire BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie) – ancien Président de la section de Diyarbakir de l’IHD, affiliée à la Fédération internationale des Ligues des Droits de l’Homme – Selehattin Demirtaş, au premier ministre Recep Tayyip Erdoğan qui a mis en cause le parti pro-kurde : non seulement il a reproché au BDP d’avoir des liens avec le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, mais il a accusé les municipalités BDP dirigeant des villes du sud-est anatolien de décourager les investissements et de refuser le soutien du TOKI, instance de construction et d’aménagement, qui est directement rattachée aux services du premier ministre.
Ces attaques politiciennes cherchent à masquer une nouvelle orientation gouvernementale qui tourne le dos aux négociations de paix : “l’ouverture démocratique” est vraiment passée au second plan ; à l’issue de cette passe d’arme, Selehattin Demirtaş a rappelé que le BDP était le parti de la paix et de la démocratie et a déposé une motion de censure visant à sanctionner la politique du gouvernement.
Mais l’AFP préfère publier les bilans flatteurs des succès militaires dont on sait par avance qu’ils doivent être pris avec circonspection.
André Métayer