“Özgür Önderlik Özgür Kürdistan !” (“Un leader libre, un Kurdistan libre !”). Affiches et slogans fleurissent à Diyarbakir (Amed en kurde) à l’occasion de la campagne électorale. La guerre des affiches est lancée : celles du BDP qui arboraient le portrait d’Öcalan ont été arrachées et l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More a déployé les siennes, avec la photo d’Erdogan. Les affiches AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More qui sont placardées dans la province de Diyarbakir, au sud-est de la Turquie, sont rédigées en kurde ! Grosse ficelle électoraliste ou début d’une reconnaissance de l’identité kurde ?
Vers une autonomie kurde en Turquie?
“Vers une autonomie kurde en Turquie?” titre Zaman, journal islamiste tendance Hizmet (confrérie Fethullah Gülen) qui s’ indigne :
à l’approche des élections municipales de mars 2014, les dirigeants du BDP, parti pro-kurde, évoquent de plus en plus l’idée de l’«autonomie démocratique». La polémique a repris de plus belle. Et justement, le BDP n’y va pas de main morte : il a commencé à parer la ville de Diyarbakir d’affiches qui restent en travers de la gorge de beaucoup : Özgür Önderlik Özgür Kürdistan ! avec un portrait récent d’Abdullah Öcalan. On pouvait mieux faire en termes d’apaisement.
Loin de brandir le brûlot de la révolte, Selahattin Demirtas, coprésident du BDP a rappelé qu’il ne s’agit pas de proclamer l’autonomie démocratique mais de bâtir ensemble un “système d’auto-gouvernance” et de montrer que les municipalités sont capables de le mettre en place concrètement.
Le BDP révolutionne les élections locales
Le BDP présente 241 candidats aux élections municipales de 2014 en Turquie, 241 noms qui figureront sur les bulletins de vote, mais en fait ce sont 406 candidats et candidates qui sont proposés comme coprésidents et coprésidentes pour diriger les municipalités. Le BDP invente le concept de “co-maire”. Ce duo homme/femme ou femme/homme n’a pu être mis en place partout, notamment en milieu rural. La stricte égalité (50 %) n’est réalisée que dans les grandes villes. Elle atteint 44% dans les villes moyennes et 31% dans les petites communes et c’est déjà remarquable. Le BDP arrive à présenter 168 candidates et 238 candidats, soit 42 % de candidatures féminines et 58 % de candidatures masculines.
Gültan Kışanak et Firat Anli, candidats BDP à la mairie métropolitaine de Diyarbakir
C’est donc une femme, Gültan Kışanak, qui sera maire de Diyarbakir en duo avec l’ancien maire de Yenisehir (arrondissement de Diyarbakir), en remplacement d’Osman Baydemir, qui ne pouvait postuler un 3ème mandat en application du règlement du BDP qui impose le turn-over. Par contre, Osman Baydemir se voit confier une mission difficile et importante : gagner la ville métropolitaine d’Urfa (Şanlıurfa, Riha en kurde : 788 956 hab.) des mains de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More. Osman Baydemir est bien connu à Rennes, de même qu’Abdullah Demirbaş, maire de Sür (arrondissement de Diyarbakir) qui part à la conquête de la ville métropolitaine d’Antep (Gaziantep, Dîlok en kurde : 1 753 596 hab) également aux mains de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More. L’un et l’autre ont été reçus par la ville de Rennes. La délégation des Amitiés kurdes de Bretagne a été reçue par l’un et l’autre en avril 2013.
Gültan Kışanak
Gültan Kışanak est née le 15 Juin 1961 à Elazığ. Étudiante à l’université de Dicle, elle a connu, dès l’âge de 19 ans, la tristement célèbre prison de Diyarbakir où elle est restée deux ans. Militante féministe, journaliste, elle entre au Parlement en 2007 comme députée de Diyarbakir et est réélue en 20011 à Siirt. Coprésidente du BDP avec Selahattin Demirtas, elle a conduit en septembre 2012 la délégation du BDP qui s’est rendue en Afrique du Sud au 24ème congrès de l’Internationale socialiste où elle a notamment rencontré la délégation française du PS et des personnalités comme Desmond Tutu, lauréat du prix Nobel de la Paix. En tant que candidate à la mairie de Diyarbakir, elle entend développer une politique de transport, gênée aujourd’hui par le trafic militaire et protéger l’environnement contre une politique urbanistique imposée par TOKI, l’administration gouvernementale pour le développement de l’habitat.
En Turquie, les autorités locales sont placées sous la tutelle d’un État centralisé. Cette tutelle doit être levée
déclare la future maire de Diyarbakir.
Firat Anli
Firat Anli est né en 1971 à Diyarbakır. Avocat de formation, il a, durant plusieurs années, dirigé l’antenne locale du HADEP puis du DEHAP à Diyarbakır. En 2004, il a été élu maire de Yenişehir, (arrondissement de Diyarbakir). Candidat malheureux aux élections municipales de mars 2009 à Bingöl (arrivé en 2ème position derrière le candidat AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More), il a dirigé la section locale du DTP à Diyarbakir jusqu’à son arrestation. Firat Anli a été, durant son mandat, reçu par le Parlement européen et a également participé aux instances de l’Internationale socialiste. Victime des grandes vagues d’arrestation touchant principalement des élus et des dirigeants du DTP, il a été arrêté le 26 décembre 2009 et détenu plus de 4 ans dans le cadre des procès KCKUnion des Communautés du Kurdistan (Koma Civakên Kurdistan), fédération des organisations kurdes en Turquie. More. Il a été remis en liberté le 18 février dernier.
André Métayer