Fondé en 2015 à Strasbourg par le courant conservateur de la communauté d’origine turque, le Parti Egalité Justice (PEJ) qui “aspire à devenir un acteur à part entière de la vie politique française” revendique plus de 3000 adhérents à travers l’Hexagone. Il compte présenter 68 candidats aux prochaines élections législatives (11-18 juin). “Pour la plupart nous avons milité dans les partis traditionnels qui se sont servis de nous à des fins électoralistes. D’où la création de notre propre mouvement qui place l’humain au cœur des débats et qui s’adresse aux classes populaires, aux populations issues de la diversité et aux déçus du système” déclare son président national, Şakir Çolak, qui a appelé ses sympathisants à voter blanc à l’élection présidentielle. Des candidats seraient déjà en lice en Côte-d’Or, dans l’Yonne, le Jura, à Lyon, dans les Bouches-du-Rhône et surtout en Alsace.
Le PEJ se propose d’être une alternative afin de “répondre aux problèmes des Français” et se défend de toute proximité idéologique avec l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More du président turc Recep Tayyip Erdoğan. “Je mets au défi quiconque de prouver que nous avons des liens avec l’AKP”, s’emporte Şakir Çolak.
Le parti “Égalité et Justice” avance masqué
Interrogé sur la dérive autoritaire en Turquie, le PEJ indique qu’il n’est pas question de s’intéresser aux “faits extérieurs” à la France, mais dénonce néanmoins “toutes les menaces terroristes, qu’elles émanent de populations kurdes, de l’Etat islamique ou d’Al Qaïda” et, bien évidemment, en premier lieu du PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, ritournelle bien connue chère au président dictateur Erdoğan. Toute référence turque et/ou musulmane est soigneusement biffée des déclarations du PEJ mais l’identité de ses dirigeants est éclairante, notamment celle de Murat Yozgat, qui s’est présenté aux élections législatives partielles à Strasbourg de mai 2016 et est à nouveau candidat en 2017. On a pu lire dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, le 18 mars 2016, que le PEJ, créé avec des revendications communautaristes et religieuses, tentait déjà de masquer son profil,
mais les liens d’origine sont loin d’être rompus. Murat Yozgat est en effet bien connu au sein de la communauté turcophone alsacienne. Il a été en charge du développement de l’UETD, l’Union des démocrates turcs européens. Cette association considérée comme un relais en Europe de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More, le parti islamo-conservateur au pouvoir en Turquie a, entre autres manifestations, co-organisé le meeting du président turc Recep Tayyip Erdoğan au Zénith de Strasbourg en octobre 2015. Murat Yozgat a même été l’un des cadres en Alsace de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More pendant les législatives turques de l’an dernier [2015].
Le parti communiste français est monté au créneau et dénonce le PEJ qui “compte en son sein des islamistes et des fascistes issus de la sinistre organisation des Loups Gris”. Il se serait illustré récemment par des tentatives d’entrisme dans diverses institutions, le fichage d’opposants au référendum d’avril 2017 et par des appels à la haine d’imams inféodés au pouvoir d’Ankara. Pierre Laurent, secrétaire général du PCF qui dénonce la présence de ce parti dans le paysage électoral français “de nature à attiser le nationalisme et faire taire les démocrates turcs et kurdes de France” a demandé au ministre de l’intérieur de diligenter sans délai une enquête pour défaire cette manœuvre contre la démocratie et la République française. Il écrit notamment :
il s’agit sans aucun doute de la part du président Erdoğan et de son parti l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More de peser sur les orientations de notre politique internationale, en particulier vis-à-vis du régime turc qui verse à pas accélérés dans la dictature. La même stratégie a été utilisée aux Pays-Bas ; il faut y mettre un terme.
André Métayer