Comment régler la question kurde ? La Turquie a toujours voulu, semble-t-il, appliquer des schémas plus ou moins obsolètes encore enseignés dans les académies militaires pour vaincre les « insurrections » : les experts vous démontrent au tableau noir qu’il faut, après avoir détruit ou expulsé les forces insurrectionnelles et déployé « des unités locales statiques, » prendre le contrôle de la population et « détruire l’organisation politique insurgée, » avant de « mettre en place un nouveau parti politique issu d’élections locales » dont les heureux élus auront été préalablement mis à l’épreuve.
Les résultats escomptés n’étant pas au rendez-vous, après vingt ans de lutte, le gouvernement islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan a-t-il été tenté de changer de stratégie? On peut le penser, avec, sans doute, deux objectifs en tête : régler la question kurde – mais a minima – en octroyant des droits culturels et linguistiques et profiter de cet avantage pour prendre le contrôle de toute cette région kurde qu’on appelle l’Anatolie du sud-est.
La première erreur est d’avoir voulu octroyer des droits, qui plus est limités, et non pas de les négocier avec le DTP (Parti pour une Société démocratique), le parti légal pro-kurde représentatif issu des urnes ; la deuxième fut de mêler des manœuvres de politique politicienne au règlement d’une question d’intérêt national, régional et international.
Pour réaliser son plan assez machiavélique, le Premier Ministre Erdogan se devait de museler son opposition « laïque et nationaliste » et d’éradiquer le DTP ; l’ouverture d’un débat démocratique qu’il appelait de ses vœux exigeait, dans le même temps, un certain nombre de conditions, la première d’entre elles étant une réforme de la Constitution qui, rappelons-le, est celle de1982, issue du coup d’État militaire de 1980.
On objectera à tort que le parti gouvernemental, l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More, n’avait pas la majorité requise pour voter des réformes constitutionnelles, car, avec le jeu des alliances, la réalité arithmétique pouvait être dépassée, mais, pour ce faire l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More avait besoin des voix kurdes (+ 5 ou 6 voix toujours possibles à trouver dans l’hémicycle d’une Assemblée). Cruel dilemme!
Malgré l’exécution d’un plan d’arrestations systématiques d’élus et de cadres du DTP, commencé depuis les élections du 29 mars 2009, R.T. Erdogan avait pris l’avantage et lancé, le 22 juillet, un processus d’ouverture ; il avait reçu Ahmet Türk, président du DTP, et accepté tacitement, en octobre, l’entrée en Turquie de deux groupes : les « groupes de Paix, » composés de combattants sans armes et des réfugiés venant des camps d’Irak ; le président du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More), Abdullah Öcalan, annonçait, du fond de sa prison, la publication de sa feuille de route et la question de sa participation aux négociations de paix n’apparaissait plus comme une question tabou. Bref, l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More faisait bouger les lignes.
L’accueil délirant que la population kurde a réservé aux groupes de Paix a fait comprendre au monde entier que la rébellion n’était pas un groupe de mafieux ou de terroristes mais était l’expression violente d’un peuple nié ; il a fait aussi grincer les dents de l’opposition parlementaire et provoquer une intervention du chef d’état-major des armées, le général Ilker Basbug, qui lança un sévère avertissement.
Les plans gouvernementaux s’en sont trouvés contrariés et la politique de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More a manqué, alors, de visibilité et de détermination : ce fut le moment choisi par « l’Etat profond » (cette nébuleuse Armée – Police – Justice – Haute Administration) pour siffler la fin de la partie par l’intermédiaire de la Cour constitutionnelle. Faute d’avoir fait à temps les réformes constitutionnelles, le gouvernement s’est trouvé piégé par la Justice qui, en vertu de l’article 69 de la constitution, prononça la dissolution du DTP au motif qu’il serait « un foyer d’activités préjudiciables à l’indépendance de l’Etat et à son unité indivisible » et le bannissement de la vie politique pour 37 responsables de ce parti dont son président Ahmet Türk.
Ce vote est néanmoins troublant car il a été acquis à l’unanimité, y compris avec la voix des juges nommés à la Cour constitutionnelle par le Président (AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More) de la République et le Parlement turc (à majorité AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More) ; il est donc légitime de se demander si l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More n’a pas joué double jeu pour mieux revenir au fameux schéma des académies militaires : reprendre le contrôle de la population kurde qui lui a échappé aux dernières élections locales et régionales en détruisant l’organisation politique qui ne s’est pas désolidarisée de la rébellion, avant de mettre en place un nouveau parti politique qui sera, bien entendu, le parti islamique AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More.
Les faits, en tous cas, sont là : la jeunesse kurde qui est descendue dans la rue a été durement réprimée, une nouvelle vague d’interpellations et d’incarcérations a touché principalement les élus locaux et régionaux, visant à déstabiliser les collectivités locales gérées par l’ex DTP devenu BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie).
Abdullah Öcalan a montré une fois encore que son autorité était intacte et qu’il était toujours un interlocuteur incontournable : c’est à sa demande que les manifestations de rue ont cessé et que les députés ex-DTP ont repris le chemin du Parlement, au grand soulagement des chancelleries européennes et de l’opinion internationale.
Il semble que nous soyons revenus à la case départ, en espérant que les voix turques et kurdes qui s’étaient exprimées pour une solution négociée ne seront pas étouffées par l’auto censure et la crainte des procès :
le débat sur la question kurde reste verrouillé dans la presse estime Reporters sans Frontières qui note au passage
une vingtaine d’affaires ouvertes à l’encontre du rédacteur en chef du seul journal publié en langue kurde, Vedat Kursum et le silence imposé aux publications pro-kurdes jusque sur internet.
La force n’a rien résolu et l’option militaire est restée inopérante : les raids quasi quotidiens sur les monts Qandil du Kurdistan irakien, où se trouvent dit-on les groupes armés du PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More, n’ont pas modifié les rapports de force mais le coût élevé de ces opérations pèse lourdement sur l’économie turque en récession qui négocie depuis des mois un nouveau crédit du Fonds monétaire international.
L’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More – ou un autre gouvernement – sera obligé de reprendre les négociations, car
la conquête des cœurs s’accommode mal d’un emploi excessif et parfois indiscriminé de la force.[[Arnaud de La Grange et Jean-Marc Balencie (“Les guerres bâtardes”)]]
André Métayer
Dernière minute : le gouvernement ne désarme pas et poursuit de sa vindicte 5 députés BDP (ex-DTP) : Ahmet Türk et Emine Ayna (députés de Mardin), Sebahat Tuncel (députée d’Istanbul), Aysel Tuğluk et Selahattin Demirtaş (députés de Diyarbakır) ; il menace de quérir de force ces deux hommes et ces trois femmes qui refusent de répondre à la convocation du tribunal au motif qu’ils sont toujours couverts par leur immunité parlementaire. Le bras de fer continue.