Les commentaires haineux que suscite l’article que nous avons cosigné, paru sur Rue 89, montrent visiblement que nous avons visé juste : ils sont un reflet de ce que subissent les Kurdes qui osent revendiquer des droits culturels et politiques. De ce point de vue, on peut se féliciter de faire “sortir les loups du bois”… “des loups gris” ? Pas tous, peut-être, mais ceux qui sont mal informés ou manipulés savent-ils qu’ils vont à l’encontre de ceux qui veulent la paix ?
Car c’est bien de la paix qu’il s’agit. Paix en Turquie, paix au Moyen Orient, paix dans le monde.
Tous les politiques et tous les militaires savent que la question kurde doit être réglée. Certains préconisent une solution radicale à la sri lankaise, difficile quand même à réaliser sauf en employant des méthodes génocidaires… impensables, insoutenables.
Cette solution est, in fine, vouée à l’échec car, n’en déplaisent à certains, la grande majorité des Kurdes soutient les élus, locaux régionaux et nationaux, unis dans la plateforme d’associations et mouvements kurdes, le DTK, dont le parti politique pro kurde, le BDP, est membre. Or nombre de familles ont, dans la guérilla, un fils, une fille, un frère, une sœur, un cousin, une cousine et n’accepteront pas qu’ils soient massacrés.
Il n’y a pas d’autres solutions, pour la Turquie, mais aussi pour tous les pays qui la soutiennent dans le cadre de l’OTAN, qu’une solution négociée. Elle est réclamée par le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More : il a, unilatéralement, décrété pas moins de huit cessez-le-feu qui ont essuyé à chaque fois une fin de non recevoir.
Etaient-elles des faux semblants, les négociations entamées depuis plus de trente mois avec Öcalan? Il faut souhaiter que non, mais force est de constater que depuis les succès électoraux du DTP, puis, de son remplaçant, le BDP, le gouvernement AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More a fait une incroyable marche arrière : 4 000 cadres, élus politiques et associatifs, sont détenus, sans jugement, certains depuis avril 2009, au motif qu’ils seraient membres ou qu’ils soutiendraient une entreprise terroriste. Qui peut croire sérieusement cela ? Les Kurdes et leurs élus ne seraient donc tous que les membres d’une bande de terroristes irresponsables ?
Qui a écrit “il peut exister plusieurs peuples dans un même pays et un même peuple peut exister sur plusieurs pays” C’est Öcalan, le “terroriste”, terme utilisé pour condamner en son temps Mandela et bien d’autres qui se sont battus pour la reconnaissance des droits de leurs peuples.
Le BDP a ouvert son 2° congrès à Ankara avec, à l’ordre du jour “autonomie démocratique dans une république démocratique”. Le manque de démocratie en Turquie, c’est effectivement la raison essentielle du conflit, une Turquie qui en est encore à maintenir sous tutelle les Collectivités locales ![[Un exemple parmi d’autres : la ville d’Hakkari s’est vue refuser par le gouvernement de R.T. Erdogan la permission de recevoir, pour la construction d’un centre de santé, une subvention de collectivités françaises (Conseil général de Bretagne, ville de Brest, Conseils généraux du Finistère et d’Ille et Vilaine), au motif de liens supposés avec le PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More.]]
Il est faux de prétendre que les Kurdes de Turquie sont des “séparatistes”. Ils veulent une paix négociée qui permettent le retour dans leurs foyers de tous les combattants et tous les détenus politiques, et une constitution qui reconnaitrait leurs droits culturels, linguistiques et politiques. Mais pour cela, il faut cesser de hurler avec les loups ultranationalistes turcs qui n’ont que la haine à la bouche.
Gérard Alle et André Métayer