Tahir Erçi, bâtonnier de Diyarbakir, a été exécuté d’une balle dans la tête ce matin, au cours d’une conférence de presse qu’il tenait à Diyarbakir, en plein centre historique, pour dénoncer les opérations de guerre et les atteintes au patrimoine historique qui en résultent.
Avocat connu et engagé de la cause kurde, Tahir Elçi faisait l’objet de poursuites pour avoir affirmé sur une chaine d’information que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKKPartiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan, fondé en 1978. More), n’est pas une organisation terroriste mais un mouvement politique qui a d’importantes revendications politiques et qui dispose d’un large soutien populaire. Interpellé le 20 octobre dans son bureau de Diyarbakir – une première pour un bâtonnier -, mis en examen, il avait été inculpé d'”apologie du terrorisme” avant d’être remis en liberté sous contrôle judiciaire. Selon les réquisitions du parquet, il risquait jusqu’à sept ans et demi de prison.
Tahir Erçi faisait l’objet d’une véritable campagne de lynchage médiatique et judiciaire, qui touche nombre d’opposants à la politique du président Erdogan, n’hésitant pas à les éliminer d’une façon ou d’une autre, aidé en cela par le nouveau gouvernement composé de sa garde rapprochée, parmi laquelle son gendre, nouveau ministre de l’Energie, pourtant mêlé à quelques affaires de corruption, vite étouffées. Dans ce climat nauséabond, les représentants politiques kurdes sont constamment désignés comme des cibles par les autorités turques. Selahattin Demirtas, lui-même, co-président du Parti démocratique des Peuples était victime, il y a peu, d’une tentative d’assassinat. Mais les Kurdes ne sont pas les seuls à être visés. Deux journalistes viennent d’être écroués pour avoir publié des informations sur les livraisons d’armes de la Turquie en Syrie : il s’agit de Can Dündar et Erdem Gül, respectivement rédacteur en chef et correspondant à Ankara du quotidien Cumhuriyet (La République), de tendance kémaliste et considéré comme un des journaux de référence en Turquie.
L’exécution d’une balle en pleine tête de Tahir Erçi rappelle celle des trois militantes kurdes exécutées à Paris le 9 janvier 2013. Les commanditaires de ce triple assassinat sont nettement désignés par les magistrats instructeurs qui notent que de nombreux éléments de la procédure permettent de suspecter l’implication du MITOrganisation du renseignement national (Millî İstihbarat Teşkilatı), services secrets turcs. More (services secrets turcs directement sous la coupe du premier ministre Erdogan devenu président) dans l’instigation et la préparation des assassinats.
Déclaration du Conseil démocratique kurde en France
Avec la mort de Tahir Elçi, Diyarbakir et l’ensemble des peuples de la Turquie ont perdu un homme très estimé qui s’est toujours battu pour la justice, la paix et la liberté. Nous présentons nos condoléances à sa famille, à ses proches et à tous les peuples de Turquie.
La politique turque de guerre, de terreur et de lynchage est directement à l’origine de l’exécution de Tahir Elçi. Les auteurs et les commanditaires de ce crime lâche doivent immédiatement être identifiés, jugés et condamnés.
Nous appelons toutes les organisations démocratiques et toutes les personnes attachées à la justice, la paix et la liberté à condamner cet attentat et à soutenir la résistance contre le régime fasciste de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More.
Appel du Conseil démocratique kurde de Rennes et des Amitiés kurdes de Bretagne
Le Conseil démocratique kurde de Rennes (CDK-R) et les Amitiés kurdes de Bretagne présentent leurs condoléances aux proches et aux amis de Tahir Elçi.
Ils lancent un appel aux élus politiques et associatifs pour qu’ils manifestent leur solidarité.
Ils demandent respectueusement à Monsieur le Bâtonnier de Rennes d’inviter tous les avocats à manifester leur réprobation et de créer un vaste mouvement solidaire du barreau de Diyarbakir, pour que toute la vérité soit faite et que la justice passe.
André Métayer