Dans sa séance du 13 juin dernier, le Parlement européen a voté une résolution sévère fustigeant l’attitude du gouvernement turc face aux évènements qui se déroulent place Taksim à Istanbul. Le Parlement européen condamne fermement l’intervention brutale de la police entraînant des affrontements avec les manifestants, qui se sont rapidement propagés dans d’autres villes de Turquie et qui ont fait quatre morts et plus d’un millier de blessés. Il fustige l’attitude de la police qui a recouru au gaz lacrymogène, y compris en visant directement les manifestants à l’aide de grenades lacrymogènes, causant par là des blessures graves, qui a procédé à des arrestations massives et qui a provoqué de graves dommages pour la propriété publique et privée.
On peut lire notamment :
[le Parlement européen] invite les autorités turques à garantir et à respecter les droits de tous les citoyens à la liberté d’expression et à se réunir et à manifester pacifiquement ; exige que tous les détenus aient accès sans restriction à l’avocat de leur choix ; demande la libération immédiate de tous les manifestants pacifiques arrêtés et actuellement détenus ; demande des informations sur le nombre exact de détenus et de blessés ; déplore les réactions dures du gouvernement turc et du premier ministre Erdogan, dont le refus de prendre des initiatives en faveur de la réconciliation, de présenter des excuses ou de comprendre les réactions d’un segment de la population turque n’ont fait que contribuer à polariser davantage la société turque.
Le Parlement européen rappelle aussi à la Turquie que, dans une démocratie intégrative et pluraliste, tous les citoyens devraient se sentir représentés et que la majorité est tenue d’associer l’opposition et la société civile au processus décisionnel. A ce sujet, le Parlement européen observe que
la vague de protestations sans précédent reflète également le mécontentement qui grandit dans des pans de la population turque face à la réglementation du mode de vie ; rappelle que, dans le cadre d’une politique démocratique, les gouvernements se doivent de promouvoir la tolérance et de garantir la liberté de religion et de conviction de tous les citoyens ; demande au gouvernement de respecter la pluralité et la richesse de la société turque et de protéger les modes de vie laïcs.
Cette résolution éclaire aussi d’un jour nouveau une situation que nous dénonçons depuis longtemps, celle qui tend à museler totalement la presse et les medias :
[le Parlement européen] exprime sa préoccupation face à la détérioration de la liberté de la presse, à certains actes de censure et à l’autocensure de plus en plus pratiquée parmi les médias turcs, y compris sur internet ; invite le gouvernement turc à veiller au respect du principe de la liberté de la presse ; fait observer qu’une presse indépendante est indispensable à une société démocratique et met en avant, dans ce contexte, le rôle essentiel du pouvoir judiciaire pour protéger et améliorer la liberté de la presse, afin de garantir ainsi un espace public propice aux débats libres et ouverts à tous ; s’inquiète du grand nombre de journalistes en détention et des nombreux procès de journalistes en cours ; demande la libération des militants actifs dans les médias sociaux ; juge profondément regrettable la décision du RTUK (Conseil suprême de la radio et de la télévision) de sanctionner les chaînes de télévision qui ont couvert les événements du parc Gezi depuis le début pour “atteinte au développement physique, moral et mental des enfants et des jeunes”.
André Métayer