Mercredi 6 juin, lors du congrès de la CFDT qui se tenait à Rennes, la parole a été donnée aux invités internationaux parmi lesquels lhan Yigit, secrétaire de la confédération des syndicats des travailleurs du service public (KESK) en Turquie, qui reçut une véritable ovation lorsqu’il monta à la tribune.
KESK est le syndicat le plus combatif du service public en Turquie. Nous suivons son combat depuis plusieurs années et des délégations des AKB ont rencontré à Diyarbakir ses représentants à plusieurs reprises.
Nous avons relaté la dure répression dont il est l’objet depuis des années et donné son point de vue sur la question kurde, “un des plus sérieux problèmes de la politique intérieure en Turquie” :
KESK ne s’arrête pas au syndicalisme de salaire, il insiste pour donner son avis et intervient dans les autres problèmes du pays comme notamment celui de la question kurde. Nous travaillons de manière active pour la paix avec les Kurdes.
Le fascisme se nourrit d’hostilité contre les étrangers, de nationalisme et des crises économiques
L’intervention lhan Yigit au congrès de la CFDT confirme la ligne combative de KESK. Dans son analyse il pointe une augmentation des attaques contre le travail et les formes de solidarité, une pression accrue, une précarisation du travail et une limitation de la sécurité de l’emploi à l’échelle mondiale :
dans ce contexte le fascisme se nourrit d’hostilité contre les étrangers, de nationalisme et des crises économiques. Ceux qui mettent en place les politiques de guerre se servent du nationalisme face à la montée des immigrants de guerre et profitent également de la main d’œuvre immigrante, moins chère. Nous pouvons voir cela comme un résumé du capitalisme.
J’aimerais vous parler de mon pays, la Turquie
En tant que fonctionnaire, dirigeant de confédération, démocrate et citoyen, j’aimerais surtout vous parler de mon pays où la situation empire jour après jour sous le régime fasciste de l’AKPAdalet ve Kalkınma Partisi (Parti de la Justice et du Développement), parti islamiste aux mains de l’autocrate Erdogan. More. Ce parti politique est au pouvoir depuis plus de 16 ans. Il provoque la guerre au Moyen‐Orient et je suis au regret de vous dire qu’il a des contacts directs avec des organisations réactionnaires et barbares comme l’État islamique et L’Armée syrienne libre… Chers camarades, à l’heure actuelle, plus de 140 000 fonctionnaires ont été limogé sans enquête, sans procès, sans le droit de la défense et donc d’une manière illégale avec les décrets‐lois. Et ils ne recevront aucune aide, y compris l’aide au chômage. 57 personnes limogées se sont suicidées, dont deux sont membres de notre confédération. Aujourd’hui 4 218 membres de notre Confédération KESK sont démis de leurs fonctions avec les décrets‐lois. Je veux attirer votre attention encore une fois sur le fait que nos amis ont été limogés sans aucun processus judiciaire… Une commission d’examen des opérations de l’état d’urgence, composée de membres tous nommés par le gouvernement, est créée afin d’éliminer les pressions internationales et pour étaler le processus de la Cour européenne des Droits de l’Homme sur plusieurs années. Il est très clair que la commission est sous l’influence du gouvernement, la finalisation des demandes prendra des années et cette commission n’est qu’un outil de distraction.
lhan Yigit évoque aussi la situation d’au moins 330 dirigeants syndicaux licenciés, dont les deux co-présidents, que le gouvernement ne veut plus reconnaitre, parce que “licenciés” et ce au mépris des conventions de l’OIT (Organisation internationale du travail), des pactes internationaux et même de la constitution turque actuelle.
Le coup d’État civil d’Erdoğan
Chers camarades, considérant notre temps limité, je ne pourrai pas vous parler des milliers d’injustices auxquelles nous faisons face. Pour souligner la gravité de la situation que nous endurons, nous l’appelons coup d’État civil. Nous sommes de la culture, de la tradition gauchiste, socialiste. En tant que confédération, KESK, de notre fondation à nos jours, nous nous sommes battus du côté du travail, de la démocratie, la paix, les droits syndicaux et la liberté. Nous en avons payé le prix, nous en payons encore mais nous ne cesserons jamais de nous battre.
André Métayer