Noam Chomsky, philosophe américain, professeur émérite de linguistique, est aussi un intellectuel engagé. Il fustigeait déjà en 1999 la politique américaine (“Deux heures de lucidité”) :
en Tchétchénie, on ne peut rien faire à cause de la menace nucléaire. En revanche, nous sommes co-responsables des atrocités commises contre les Kurdes en Turquie. Nous pouvons très bien décider d’arrêter d’y participer. Mais, à part Soljenitsyne, rares sont ceux qui veulent contrarier la Turquie ou les États-Unis, qui fournissent aux Turcs les armes utilisées dans les exactions contre les Kurdes. […] Ce que les Russes font en Tchétchénie est terrible, mais ce n’est rien comparé à ce que les Américains ont fait en Indochine. Ou comparé aux Turcs contre les Kurdes : deux à trois millions de réfugiés, 3 500 villages détruits, des dizaines de milliers de morts. Les Turcs disposent d’avions, de tanks, d’armements lourds. Ils peuvent faire ce qu’ils veulent, puisque Clinton les leur fournit. Plus ils commettent d’exactions, plus les Américains augmentent leur aide militaire.
Aujourd’hui, ému par le combat désespéré que mènent les grévistes de la faim dans les prisons turques, Noam Chomsky lance un appel au gouvernement turc, dicté à la fois par des sentiments de simple humanité et en raison des conséquences dramatiques que pourrait avoir la prolongation de ce mouvement d’un point de vue politique et des droits humains :
en ne répondant pas d’une façon humaine et civilisée aux demandes formulées, qui me paraissent tout simplement raisonnables, le gouvernement turc s’enfonce dans une crise pire que celle qui se profile aujourd’hui.
André Métayer