Depuis maintenant plusieurs années, nous assistons dans une grande partie du monde, à des bouleversements politiques majeurs, qui traversent plusieurs continents de l’Amérique latine, des peuples du monde arabe et même d’Europe. Ce qui est commun à tous ces mouvements populaires souvent de portée révolutionnaire, c’est le rejet des politiques menées par des régimes autoritaires et dictatoriaux, des pouvoirs ayant perdu toute légitimité, gangrénés par la corruption, répressifs, et refusant de reconnaître les droits politiques, sociaux, culturels de leur peuple. Souvent, ces régimes ont bénéficié, durant de longues années, du soutien des puissances occidentales. La Syrie n’échappe pas à ces mouvements profonds qui traversent les peuples de la région.
Des manifestations massives et pacifiques pour la démocratie, la dignité, la justice sociale ont été durement réprimées par le pouvoir de Bachar Al Assad. La répression impitoyable s’est peu à peu transformée en véritable guerre contre son peuple, le pouvoir n’hésitant pas à user de sa puissance militaire face à des groupes armés constitués, et les civils sont les premières victimes.
Comment sortir de cette spirale meurtrière?
Aucun des deux camps ne paraît aujourd’hui en mesure de prendre le dessus sur l’autre. Au plan de l’opposition syrienne, entre celle de l’intérieur et de l’extérieur, les divisions restent dominantes. Le CNS soutenu par les Occidentaux n’a pas la reconnaissance populaire, et le poids des Frères musulmans au sein des instances dirigeantes inquiète. Au final, les appels répétés à l’union de l’opposition restent sans réponse.
La Syrie se trouve placée au cœur de contradictions des intérêts des puissances régionales et mondiales. La Turquie, membre de l’OTAN, le Qatar, l’Arabie Saoudite, soutiennent, financent et arment une partie de l’opposition armée dans laquelle on trouve des groupes islamistes de plus en plus présents. Les Etats-Unis et les alliés du Golfe veulent briser l’axe Syrie-Iran-Hezbollah et transformer durablement le rapport de force d’une région riche en hydrocarbures. De leur côté, les Russes, alliés de la Syrie, veulent préserver leur place dans cette partie de la zone méditerranéenne, et veulent se protéger de toute intrusion de groupes islamistes dans le Sud-Caucase. Comme on le voit, la Syrie est confrontée à des enjeux qui dépassent ses propres intérêts et se voit interdire de choisir librement son avenir, de construire une Syrie démocratique et laïque.
Un exemple : le peuple kurde
Tout doit être mis en œuvre par tous les acteurs et les instances internationales pour parvenir à un cessez-le-feu, et d’ouvrir un dialogue politique visant au changement de régime. Cette voie est la seule pour mettre un terme aux violences actuelles et à son flot de victimes innocentes, et évitera une extension des combats, toujours possible aux pays voisins, qui pourrait conduire à une intervention militaire étrangère dont chacun mesure les risques. Les textes internationaux comme le plan en 6 points de Kofi Annan (plan de Genève) existent mais il manque la volonté politique de les appliquer par l’ensemble des protagonistes. L’intervention des peuples est donc nécessaire.
La Syrie, à la différence de ses voisins arabes, est formée d’une mosaïque de peuples. Ces différents peuples qui la composent ont des droits, qu’ils souhaitent faire entendre et respecter. C’est le cas du peuple kurde qui a été longtemps victime d’oppression et de discrimination de la part du régime : arabisation forcée, interdiction de la langue kurde dans les écoles, occupation des terres, refus de l’accès à la fonction publique et dans l’armée. Le peuple kurde en Syrie est légitime à faire valoir ses droits au plan politique et culturel. Ce serait une garantie et un atout pour une future Syrie démocratique et laïque.
Extraits de l’intervention de Patrick Margaté (relations internationales du PCF) au colloque du KNK.
Titre et sous-titres sont d’André Métayer