Son histoire est incroyable : Pinar Selek est poursuivie depuis quinze ans par la justice turque pour un crime qu’elle n’a pas commis. Elle est accusée d’avoir participé à un attentat dont elle a été déjà acquittée à trois reprises et pour cause ! Il n’a jamais existé. En fait on reproche à cette scientifique, qui vit désormais en exil à Strasbourg, d’avoir refusé de donner à la police les noms de rebelles qu’elle avait rencontrés dans le cadre de ses recherches sur le conflit kurde. Placée en détention préventive en 1998, torturée, condamnée à la prison à vie, elle a été libérée en 2000 après 36 mois d’emprisonnement. Mais à chaque fois, la Cour de cassation a invalidé la décision.
L’audience de novembre 2012 – la énième – s’est achevée sur une décision scandaleuse : le tribunal de la Cour pénale n°12 d’Istanbul est revenu sur l’acquittement qu’il avait lui-même prononcé le 9 février 2011. Il a estimé que le dernier arrêt rendu par la Cour de cassation, qui invalidait l’acquittement de l’accusée, était recevable et a condamné Pinar Selek le 24 janvier 2013 à la prison à perpétuité assortie d’un mandat d’arrêt qu’Interpol a lévé en février dernier.
La Cour de cassation turque, qui a commencé à examiner le pourvoi des avocats le 30 avril dernier, a, au terme de plusieurs heures de débats, renvoyé son jugement au 11 juin prochain.
Pinar Selek est venue à Rennes en novembre 2010 dans le cadre de la semaine de Solidarité internationale organisée par la Maison internationale de Rennes (MIR). “Être loin de chez soi, mais jusqu’où ? ” était le titre de sa conférence, “un harmonieux mélange de philosophie, de poésie et de politique ” comme le soulignait justement Ghania Boucekkine, la nouvelle présidente de la MIR.
André Métayer