“Plus de 20 personnes dont l’éditeur Ragip Zarakolu et deux journalistes kurdes emprisonnés dans le cadre l’affaire KCK ont été libérés mardi 10 avril, suite à la vague de protestations tant au niveau national qu’international. La 15ème Cour d’assises d’Istanbul a décidé de libérer l’éminent défenseur des droits de l’homme Ragip Zarakolu et une journaliste du quotidien kurde Özgür Gündem, ainsi que 13 personnes, tandis que six autres dont une journaliste de l’agence kurde DIHA ont été libérés à l’issue de 4ème audience de l’affaire KCKUnion des Communautés du Kurdistan (Koma Civakên Kurdistan), fédération des organisations kurdes en Turquie. More devant un tribunal de Van. L’éditeur et journaliste Ragip Zarakolu avait été arrêté fin octobre 2011 avec plus de 50 personnes, tandis que les six autres étaient parmi les personnes arrêtées en juin 2010 à Hakkari.” En fait de libération, il ne s’agit malheureusement que d’une remise en liberté conditionnelle.
Suite à cette vague d’arrestations de l’année passée, AKB dénonçait sur son site le traitement réservé aux journalistes, identique à celui des militants politiques ou associatifs qui ne pratiquent pas la politique d’alignement, un traitement “à la turque” qui consiste à mettre au pas les grandes agences de presse.
L’AFP est-elle complice quand elle titre perfidement : “Turquie: libération d’un écrivain-éditeur turc accusé de collusion avec le PKK”?
10 ans de prison requis pour un dossier vide
Selon Johan Bihr, représentant de Reporters sans frontières pour l’Europe et l’Asie centrale, le tribunal s’est donc décidé à prendre en considération “l’état des preuves“, “la durée déjà passée en détention“ et “la possibilité que le chef d’accusation puisse changer“ – ce qui sonne déjà comme un aveu quant à la faiblesse du dossier. Outre sa dimension arménienne, l’affaire Zarakolu s’inscrit dans un vaste contexte de répression menée en Turquie contre les avocats (42 arrestations) qui défendent les militants kurdes et que les journalistes (95 arrestations) et ce sans compter les rafles parmi les militants politiques ou les sympathisants kurdes qui se chiffrent par des milliers de cas d’emprisonnements.
“J’ai appris avec soulagement la libération de l’éditeur turc Ragip Zarakolu – citoyen d’honneur de Villeurbanne – qui était incarcéré depuis le 1er novembre dernier à Istanbul. Accusé de terrorisme en raison de son soutien aux causes kurde et arménienne, ce défenseur des droits de l’homme avait déjà été condamné, en 2008, à cinq mois de prison en vertu de l’article 301 du code pénal qui punit tout dénigrement envers l’Etat turc” a déclaré Jean Paul Bret, maire socialiste de Villeurbanne.
“L’arrestation de ces personnalités avait provoqué des protestations en Turquie et à l’étranger. Au total 193 suspects, dont la plupart sont incarcérés, seront jugés à partir du 2 juillet dans une banlieue d’Istanbul. L’acte d’accusation réclame 10 ans d’emprisonnement pour ‘soutien à une organisation terroriste’ à l’encontre de Ragip Zarakolu, et 15 ans pour Büsra Ersanli, accusée d’être la responsable d’une organisation terroriste”, note encore la dépêche de l’Afp du 10 avril. Les charges retenues contre Ragip Zarakolu ne changent pas et restent très sérieuses.
André Métayer