Selahattin Demirtaş, avocat, député de Diyarbakir, co-président du parti pro-kurde BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie), président du groupe parlementaire BDP, était à Rennes ce mercredi 30 juin.
Entre le 4e Forum mondial des Droits de l’Homme de Nantes où il est intervenu sur le thème “le peuple kurde, un peuple écartelé entre quatre Etats” et des rendez-vous importants à Paris, il a accepté de répondre à une invitation d’Amara, association kurde de Rennes qui lui a réservé un accueil particulièrement vibrant : la salle était archi-comble et les organisateurs ont dû refuser l’entrée aux derniers arrivants.
Reçu également par les Amitiés kurdes de Bretagne, le député de Diyarbakir a répondu à de nombreuses questions (sur lesquelles nous reviendrons) et à lancé un véritable appel à la mobilisation en faveur des 151 inculpés – parmi lesquels le maire de Diyarbakir – dont le procès, qui rappelle les procès des purges staliniennes, va se tenir le 18 octobre prochain.
Le spectre des Procès de Moscou
Depuis 14 mois, 1 650 militants du BDP ont été mis en détention et les motifs de leur inculpation n’ont toujours pas été notifiés ! Beaucoup sont membres des Conseils municipaux élus démocratiquement selon les règles constitutionnelles, mais il y a aussi, en grand nombre, des membres des conseils de villes et de quartiers élus par la population (NB : assemblée consultative travaillant en étroite collaboration avec les premiers).
Le 18 octobre va s’ouvrir le procès contre 151 personnes, dont 103 sont en détention – pour certaines depuis avril 2009 ; ce sont les personnalités très connues en raison des responsabilités qu’elles exercent ou qu’elles ont exercées.
Ce procès s’apparente aux procès qui se sont déroulés à Moscou, dans les années 1936/1938, ou à Prague, en 1950 ; il s’agit, dans tous les cas, d’éliminer physiquement (peines de mort, longues détentions dans un isolement total, bannissements) l’élite intellectuelle militante et morale capable de s’opposer politiquement au gouvernement totalitaire en place ; Ankara n’en est pas à son coup d’essai : en 1994, la peine de mort fut requise contre quatre députés kurdes, peine commuée en 15 années de réclusion, dont la plus connue est Leyla Zana. En 1999, Abdullah Öcalan, que les Kurdes comparent à Nelson Mandela, a échappé également à la peine de mort et croupit depuis dans un cul de basse fosse aménagé au milieu d’un ilot insalubre de la mer de Marmara. Aujourd’hui la peine de mort est abolie en Turquie mais l’énoncé des peines encourues est hallucinant : “750 000 années de prison seront requises contre les 151 prévenus” annonce l’avocat Selahattin Demirtaş qui plaide la cause de tous ces militants injustement poursuivis et lance un appel au Maire de Rennes.
Appel au Maire de Rennes
Ce procès est essentiellement politique et seule une pression internationale peut le faire avorter. Nous avons confiance en nos amis de par le monde et en particulier en Bretagne ; une solidarité s’est établie entre les villes de Rennes et de Diyarbakir depuis 1977 et nous nous souvenons du soutien que le Maire de Rennes a apporté au Maire de Diyarbakir de l’époque, Mehdi Zana, qui fut arrêté en 1980, sauvagement torturé, condamné à 36 ans de prison et incarcéré durant 11 ans. Nous appelons à nouveau le Maire de Rennes, les élus municipaux, les parlementaires à défendre Osman Baydemir, le Maire actuel de Diyarbakir (NB : qui a déjà été reçu plusieurs fois par le maire de Rennes) et les 151 inculpés : leur sort est entre vos mains.
André Métayer