La délégation des Amitiés kurdes de Bretagne, lors de sa 20° mission, a rencontré des maires, des journalistes, des associations parmi lesquelles TUHAD-FED (Tututklu hükümlü aileleri hukuk dayanisma dernekleri fedresyonu = Fédération des associations de solidarité en aide aux familles des détenus condamnés) et à chaque rencontre, à chaque entretien, la question des détenus politiques a été abordée, lancinante, incontournable. La libération de tous les détenus, à commencer par le plus illustre d’entre eux, Abdullah Öcalan, est dans toutes les têtes et la paix est à ce prix. TUHAD FED a engagé une campagne de signatures pour exiger la libération de l’ensemble des prisonniers politiques, comme l’explique Zübeyde Teker, une enseignante qui a quitté son emploi pour se consacrer exclusivité à sa fonction de présidente de la Fédération :
depuis 1993, certain nombre d’association se sont créées pour venir en aide aux détenus et à leur familles sur un plan moral, psychologique et juridique et, depuis 2003, elles se sont réunies en une seule fédération afin de concentrer les forces des militants et des membres des familles, toutes mobilisées, et constituer ainsi un rapport de force face au pouvoir de l’Etat et de l’administration pénitentiaire. Nous exigeons la libération de tous les prisonniers politiques et pour ce faire nous avons lancé une campagne de pétitions. Notre objectif est d’atteindre 10 millions de signatures d’ici le mois de septembre 2014.
Même les détenus gravement malades n’ont pas été libérés
Un an et demi après les premières rencontres entre Abdullah Öcalan et des représentants du gouvernement Erdogan qui, dans le cadre du processus de paix amorcé, permettaient d’espérer la libération des détenus malades, dans l’attente de celle de tous des détenus politiques, le constat est amer :
seuls quelques élus et avocats ont été libérés et parmi eux quatre députés. Aujourd’hui encore, des détenus gravement malades sont toujours en prison ! Si quelques personnalités politiques et syndicalistes ont pu bénéficier d’une remise en liberté, les personnes modestes croupissent en prison dans l’anonymat le plus complet, alors que les généraux responsables de milliers de morts dans les années 90 ont été libérés !
(allusion à l’affaire Ergenekon, du nom d’un réseau accusé de complot contre l’Etat, composé principalement de militaires de haut rang).
Combien sont-ils dans les 86 prisons que compte la Turquie ? 7 000 détenus politiques est le chiffre le plus souvent cité mais Il est difficile d’avoir des chiffres exacts entre population carcérale, détenus politiques, droits communs, détenus condamnés, prévenus en détention provisoire… de plus il semble que l’administration pénitentiaire brouille les pistes par un déplacement permanent de détenus d’une prison à l’autre, sans doute pour briser la résistance intérieure qui s’organise malgré les sanctions. La plus fréquente, voire systématique, est l’isolement, mais TUHAD FED, qui est en relation constante avec les avocats des familles, a relevé aussi des cas de tortures physiques et psychologiques :
toutes les personnes arrêtées subissent systématiquement des tortures. Même à leur retour d’hôpital les tortures reprennent, et de nombreux mauvais traitements sont enregistrés sur les mineurs incarcérés.
Le cas des enfants détenus reste préoccupant
Sebahat Tuncel, députée d’Istanbul, avait dénoncé en 2012 le scandale des enfants mineurs détenus et soumis à des sévices venant de détenus de droits communs auxquels ils étaient livrés par leurs geôliers. Les AKB avaient fait venir à Rennes, en novembre 2012, une exposition en soutien aux enfants kurdes emprisonnés. D’après un rapport du Ministère de l’Intérieur publié à l’occasion de la Journée mondiale de l’Enfant (Çocuk Bayramı, célébrée en Turquie le 23 avril), 2 000 enfants mineurs sont toujours détenus dans les prison turques.
Avec la participation de Pascal Tual, Michel Besnard et Claire Lagarde